11 aout 2025
Les fasciae
Aujourd’hui au centre de nombreuses discussions scientifiques, le « fascia » questionne. Nous trouvons dès l’antiquité (Hippocrate et Vésale) des descriptions de membranes entourant les muscles et tendons. Il y a un pic de popularité scientifique dans la littérature scientifique autour du XVIIIème siècle. L’étude de ce tissu devient plus précise et l’on découvre son rôle de « soutien passif » principalement pour la chirurgie un peu plus tard.
Le fascia fait donc depuis très longtemps parti des questions en fond du domaine médical, un tissu qui, sans être oublié, n’arrive jamais à complètement percer. Une starlette de soap opéra.
Cependant si on regarde de plus près la littérature de ces 5 dernières années le fascia devient de plus en plus présent voici où nous en sommes actuellement :
- loin d’être un simple « emballage » passif, la littérature 2020–2025 montre qu’il s’agit d’un réseau tissulaire ubiquitaire, richement vascularisé et innervé, qui participe activement à la mécanique, à la proprioception et à la régulation locale de l’homéostasie. Les mises à jour terminologiques du Fascia Nomenclature Committee et des synthèses récentes proposent de considérer le système fascial comme un continuum multi-couche (superficiel, musculosquelettique, viscéral, neural) aux propriétés biomécaniques et biochimiques distinctes. PMCWiley Online Library
- Sur le plan sensoriel, plusieurs études histologiques et revues systématiques documentent une innervation dense des fasciae (terminaisons libres, fibres sympathiques, récepteurs mécano-/nociceptifs), notamment dans la fascia superficielle et la deep fascia — ce qui soutient leur rôle dans la perception de la douleur, la proprioception et probablement l’ « interoception » corporelle. Ces données renforcent l’idée que le fascia peut être une source primaire de douleur musculosquelettique. MDPIPMC
- Fonctionnellement, le fascia assure la transmission et la dissipation des forces entre structures anatomiques, facilite le glissement inter-tissulaire via des matrices riches en hyaluronane, et constitue un milieu pour cellules immunitaires et de signalisation (cytokines, fibroblastes) — il intervient donc dans les réponses inflammatoires et la fibrose locale. Des revues récentes suggèrent que des altérations fasciales (densification, adhérences, modifications de l’interstitium) sont associées à des états douloureux chroniques et à la perte de mobilité. Frontiersfascialmanipulation.com
Il reste une question en suspens : est-ce que le fascia est un organe ?
La position dominante aujourd’hui est nuancée : plusieurs travaux recommandent de parler de « système fascial » ou d’« organes fascials » (sous-systèmes anatomiques) plutôt que d’un unique organe isolé. Cette approche rend compte de la complexité structurale et des fonctions plurielles du fascia sans forcer une analogie anatomique unique. Wiley Online LibraryPMC
Implications cliniques : la reconnaissance d’un rôle actif du fascia soutient des approches diagnostiques ciblant le tissu (imagerie, palpation fine, tests de mobilité) et des interventions multimodales (techniques manuelles, exercices spécifiques, prise en charge neuroinflammatoire). Toutefois, la causalité exacte entre altération fasciale et douleur reste partiellement établie — il faut davantage d’essais cliniques randomisés et de mesures objectives (imagerie, biomarqueurs) pour préciser quelles interventions modifient réellement la structure et la fonction fasciale et si cela entraîne un bénéfice clinique durable. PMCfascialmanipulation.com
